Mardi
13 juillet 2004
LES BOSSONS
Cinq
heures. Il pleut encore ! Tant pis nous ne partirons pas de bonne heure. De
toute façon l’acclimatation a été difficile, il sera bon de ne pas trop
forcer encore aujourd’hui, nous avons même dormi hier après-midi. Nous nous
rendormons d’un sommeil peu profond à l’écoute de tout changement du
temps.
Sept
heures. Nous nous levons. Isko en a marre d’être seul dehors à surveiller
les environs. Il est vrai qu’hier soir nous avons eu un épisode canin peu
banal.
Un
chien noir très grand (type croisé braque – labrador probablement) avait décidé
de se balader dans le camping. Entre autre « méfaits » : vol
de poubelle, dégustation de la gamelle d’Isko… et venir le défier sous son
nez. Et ça c’est nettement plus dangereux. Nous attrapons donc le chien en
question, et avec une drisse nous improvisons une laisse afin de l’amener à
l’accueil du camping. Avec la propriétaire, je l’enferme pour la nuit dans
la salle « épicerie », la fourrière municipale n’ouvrant que le
lendemain. Je suis très sceptique quant à la fermeture de la porte. Nous
verrons bien.
Bien
entendu, trois quarts d’heure plus tard, en plein dans notre premier sommeil,
des grognements nous réveillent. Le Gand Noir est revenu narguer Isko. Qui,
d’ailleurs, stoïque, reste couché attaché près de la tente. Il sait
d’expérience que c’est un jeune chien et qu’il aura facilement le dessus
malgré la dizaine de kilogrammes de plus pour le Grand Noir. Je sors, le
rattrape et le ramène à l’accueil du camping. Le petit monsieur est bien
ennuyé et ne sait pas quoi faire. D’autorité j’attache le chien au poteau
de l’entrée et retourne me coucher, à lui de gérer.
Bien
sûr, vers 23h30, nouveaux grognements. Habillage express. Je dois battre le
record d’habillage, avec blouson (il pleut), frontale (il fait nuit),
chaussures de marche lacée (au cas où je doive taper dans le tas pour séparer
les chiens). Je sors. Pas de chien… C’était le baroud d’honneur et nous
n’avons plus été ennuyés de la nuit. Le lendemain, le propriétaire nous
expliquera qu’il l’avait attaché avec une corde de montagne (notre
drisse-laisse ne faisant que 4 mm) et qu’il s’est sauvé dans la nuit après
l’avoir rongée.
Nous
nous levons donc vers sept heures. J’emmène Isko faire sa promenade hygiénique
du matin, et nous déjeunons. Nous préparons nos sacs, c’est la première
fois que nous les utilisons vraiment, et partons vers huit heures trente.
Au
programme… nous ne savons pas très exactement ce que nous allons faire. Nous
commençons par suivre les indications « Moraine de Taconnaz ».
Enfin notre première vraie randonnée alpine !
A
trois cents mètres du camping et à une centaine de mètres de nous, nous
apercevons une forme qui ressemble à un chat, vue la distance il serait énorme !
Ce doit être un tronc d’arbre… ou un dépôt d’ordures. Nous sortons les
jumelles. Surprise ! C’est bien un chat, à l’affût en train de
chasser. Nous l’admirons, avant qu’il ne nous évente et ne s’en aille.
Vraiment très grand, de la taille d’un lynx, mais plus foncé. Probablement
un chat sauvage.
Nous
continuons. Ça grimpe très raide, nous devons trouver notre rythme et notre
souffle. Nous ne pouvons pas avancer à la même vitesse. Nous grimpons sur la
rive droite du torrent de Taconnaz. Nous avions suivi la rive gauche deux jours
auparavant.
Après
un passage en forêt, nous traversons un alpage. Une indication « Glacier
des Bossons » nous fait continuer sur ce chemin. Nous souffrons la pente
est vraiment très raide et nous oblige à une pause tous les cent mètres
environ. Au bout de l’alpage, nous sommes rejoints par une colonie de vacances
que nous avions rencontrée à notre arrivée au centre de vacances « Don
Bosco ». Une bande de mômes vraiment sympathiques. Isko est la vedette
est fait son « show » répondant sans hésitation aux ordres donnés
« droite », « gauche », « devant », … à
la grande admiration des enfants.
Ils
font leur pause là où nous avions fait la notre et nous partons en « éclaireurs ».
Nouvelle pente très raide, les cuisses travaillent. A une bifurcation, deux
possibilités s’offrent à nous : « Les Bossons » (est-ce le
village ou le glacier ? Aucune indication complémentaire) ou l’arrivée
du télésiège. Nous choisissons « Les Bossons ». Ça descend, nous
passons sous le télésiège (quelques coucous au passage). C’est sûr, nous
descendons vers le village. Nous continuons cependant encore un peu. Nous
croisons plusieurs randonneurs dont des Anglais avec un croisé Malamute-Husky
de toute beauté.
Peu
après cette rencontre, nous trouvons une petite plate-forme de laquelle nous
voyons le glacier et sa moraine. Vraiment impressionnant. Nous décidons de
remonter à l’arrivée du télésiège afin de voir le glacier de plus haut.
Bien sûr, nous recroisons notre colo qui, elle, descend. Nous indiquons aux
accompagnateurs qu’ils vont vers le village, et continuons… après quelques
centaines de caresses pour Isko ainsi que quelques photos.
Dernières
grimpettes, nous soufflons à l’arrivée du télésiège qui vomit ses
cohortes de touristes. Curieusement nous sommes rejoints par un groupe de
personnes âgées qui montent à pied. Chapeau bas Messieurs-Dames ! Le télésiège,
quant à lui, amenant des gens plutôt jeunes !?
Nous
montons maintenant vers le chalet du glacier à 1425 m d’altitude. Nous
proposons notre aide à une jeune femme qui ravitaille le chalet, qu’elle décline.
Arrivés en haut : GRANDIOSE. Nous avons le front du glacier devant nous.
Toute la fatigue dus aux efforts fournis pour arriver là, disparaît. Nous décidons
de nous poser pour boire un chocolat et profiter du spectacle majestueux.
Pascale
demande à un couple d’Allemands de nous photographier tous les trois en échange
nous faisons la même chose pour eux.
Et
là, la colo arrive ! Re-séance de caresses et pose-photo pour Isko. Nous
avons même droit de la part d’un petit d’une dizaine d’années à un
cliché volé subrepticement de nous deux… devenons-nous des vedettes au sein
de la colo ?
La
gérante du chalet vient discuter avec nous (la jeune femme à qui nous avions
proposé notre aide à la montée). Elle a eu trois Huskies et elle est très
attirée par Isko qui ressemble, d’après elle, à la chienne qu’elle avait.
On sent à l’écouter que de nombreux souvenirs refont surface. Ses trois
chiens sont morts. La mère avait 14 ans. L’un de ses enfants est tombé
malade à la suite de la disparition de la mère, il a fallu le piquer. Le
dernier s’est enfui et a disparu.
Elle
nous donne à remplir un petit questionnaire-sondage concernant le chalet et les
informations qu’on aimerait y trouver. En fait, elle est gérante avec son
mari du chalet. Et ils aimeraient fournir d’autres informations aux touristes.
Notamment, son mari filme tous les jours, à la même heure et selon le même
angle le glacier afin de montrer en animation l’évolution de celui-ci. Ils
proposeront bientôt une projection au chalet.
Nous
repartons, pour aller à un premier belvédère d’observation… et sommes
rejoints par les mômes de la colo. Ils accèdent par groupe d’une dizaine à
la plate-forme. L’un des enfants me demandent si je sais ce qu’est un canif.
Je lui réponds « un couteau », pensant qu’il allait y avoir une
astuce. Il me réponds alors : « un petit fien » ! Rire général.
Curieux, l’approche de ces enfants à notre égard.
Dernière
étape, nous montons encore de 100 ou 150 mètres afin d’accéder à la dernière
plate-forme d’observation par un chemin aménagé et ponctué de panneaux
d’informations sur les glaciers. Nous faisons cette montée bordés par une
haie d’honneur. Bien évidemment les mômes de la colo, qui attendent leur
tour pour accéder à la première plate-forme.
Descente.
Nous avions espéré pouvoir manger en haut. Ce n’est pas possible, eu égard
à la place disponible. Au passage, nous remettons au chalet le questionnaire et
discutons encore un peu avec la propriétaire du chalet. Au passage, Isko, lui
taxe un morceau de son croque-monsieur.
La
descente est plus rapide que la montée. Nos copains de la colonie pique-niquent
sur le chemin. Nous continuons (après quelques photos d’Isko). C’est la
dernière fois que nous les voyons. Pascale transmet au mono un message pour
Gaby : le nom du camping où nous avons trouvé de la place, nous
essaierons également d’aller le voir avant notre départ.
Quelques
centaines de mètres plus loin, nous nous arrêtons au carrefour du chemin de
retour et du chemin de la « moraine de Taconnaz » pour manger.
Festin de roi ! Simple, certes, mais dans la plus belle des salles à
manger que l’on peut imaginer : taboulé, saucisson (acheté la veille
sur le marché), oranges, pain, fromage.
Il
tombe quelques gouttes. Jusqu’ici, le temps, couvert, a été propice à notre
balade. Pour une première vraie sortie, ce n’est pas mal. Taconnaz attendra
une prochaine randonnée (de toute façon nous y étions presque arrivés deux
jours auparavant).
Nous
entamons la descente, toujours aussi raide ! Il faut piloter Isko à la
voix pour le freiner. Les pierres roulent sous les pieds. Je m’aide du bâton
pour assurer les prises. Soudain, mes deux pieds partent en avant, glissant sur
l’herbe mouillée de pluie. Tracté par le chien, d’une part, et attiré
vers l’arrière par le sac, je me réceptionne sur le coude gauche. Violente
douleur et heureusement rien de cassé. Nous repartons après les vérifications
d’usage.
Les
retours se font toujours trop vite par rapport aux allers. L’enthousiasme, les
efforts à fournir ne sont pas les mêmes. Nous arrivons au camping ver 14h30.
La douche attendra, nous prenons un café et décidons de nous reposer un peu,
profitant de la chaleur de la tente (le soleil brille enfin) et de la torpeur
qu’elle engendre.
Demain
et après-demain, le temps est annoncé au beau fixe. Nous avons décidé d’en
profiter, mais nous avons besoin de quelques provisions. Pour changer, nous
allons à Chamonix. A l’entrée de la ville, près du lac des Gaillands, des
personnes s’initient à l’escalade sur une paroi rocheuse. Un point
information de la Compagnie des Guides de Chamonix nous incite à nous arrêter.
Pascale
demande à la jeune femme de l’accueil si elle connaît un guide prénommé
Franck, âgé d’environ 55 ans et qui aurait perdu un orteil (le gros) lors
d’un accident en montagne. Elle cherche dans ses listings et propose un nom
qui correspondrait à sa recherche. Devant ce succès, je pose la même question
cette fois concernant Max Liotier. Là, ça ne lui dit rien (et pourtant j’ai
le nom). Cependant, elle propose d’aller demander à un ancien guide assis à
la terrasse d’une buvette voisine.
Miracle !
Il connaît. En fait, nous avons devant nous Roland Ravanel qui est cité dans
le livre de Liotier, « Celui qui va devant ».Il nous donne son
adresse de ce dernier et nous discutons quelques minutes avec lui. Lui-même a
écrit un livre sur sa condition de guide, nous l’achèterons.
Rencontre
incroyable et si simple dans son approche. Nous essaierons de rencontrer ces
deux guides : Franck et Max Liotier.
Retour
au camping, nous avons un voisin. Cet homme va partir gravir le Kilimandjaro en
août, il vient s’entraîner un peu dans les Alpes avant.
Le
soir, nul besoin de nous bercer pour nous endormir. Demain, d’après les prévisions,
sera une belle journée. Enfin un peu de soleil.